TIRER LA CHASSE

« - Ouep, bonsoir, votre film là en avant-première, La chasse, c’est bien ?

- Les critiques sont élogieuses, c’est noté sur l’affiche, s’savez pas lire ?
- Justement, c’est encensé par ELLE alors j’me méfie…
- Qui ça ?
- Humour de caissière d’ugc de merde, je présume ?
- Vous la prenez vot’ place ou pas ?
- Je sais pas, ça parle de quoi ce film en fait ?
- Un homme accusé de pédophil…
- OK J’ACHETE DIREC’ TARIF PLEIN MÊME PAS ETUDIANT RIEN A FOUTRE.
- Tenez vot’ place, salle 7 sur vot’ gauche. Si vous trouvez pas, suivez l’odeur de merde, salle 8 Paranormal activity 4, vous c’est la salle juste à côté. »

  Susu la famille un film sur la pédophilie, rien de tel pour se mettre à la ienb sur le terter du 7ème art. La chasse a connu sa petite hype à Cannes où son acteur principal (Frédéric Nihous) a remporté le Prix d’interprétation masculine. L’histoire : un instituteur est accusé d’avoir élargi le fondement d’une fillette, la rumeur se répand et bientôt c’est toute l’école qui prétend avoir vu son diamètre anal tripler sous l‘insistance du bourru de la moyenne section. Le mec laisse dire sans chercher à se défendre et devient le paria de sa commune, on s’dit le gars c’est un missou mais on apprend qu’au Danemark cette impassibilité est naturelle, les Danois sont donc tous des missous. Mads Mikkelsen (le prof) va faire ses courses il se fait péta à la supérette ; on sonne à sa porte, il ouvre, son clébard est mort dans un sac poubelle. J’ai pas tant enjaille que ça : le réal Thomas Vinterberg nous met illico dans l’omniscience, il est acquis que l’innocence de Mads est immuable. Dès lors, le mec n'a plus aucune street cred.

  Moi j’avais imaginé ça autrement : Lucas est innocent, pardonné par la société de l’avoir condamné si hâtivement, happy-end, fondu au noir. Puis en prologue : flash-back dans la cave lugubre de l‘instit‘, éclairages rouges, Wagner en bande-son, Mads Mikkelsen la bite dans une main, l’autre occupée à tester le gameplay de l‘hymen d‘une petite n‘enfant, rires sardoniques, vision de l‘Enfer. BOUM. Fin. Palme d’or.

Au lieu de ça, un film digne et consensuel dont tu ressors avec en stéréo les avis de femelle des intelloputes du rang d’devant. « Nan mais le film tu vois i’ montre trop la société c’est touss’ des hypocrites. » Faire un film pour susciter des avis pareils, merci le cinéma de p’tite caisse.