23 juin 2011

OMAR M’A VOLER MON IPHONE

On se rappelle tous de ce terrible fait divers, le corps sauvagement assassiné de la veuve Marchal au fin fond de sa cave, l’ultime aveu de sang séché de cette femme massacrée, le regard désemparé d’Omar Raddad que tout accuse… « Omar m’a tuer » Une erreur de conjugaison qui fait encore froid dans le dos. Jacques Vergès a défendu Omar corps et âme, Jacques Chirac lui a octroyé la grâce présidentielle, rien n’y fait, le doute plane encore vingt ans après : mais qui donc ne connaît pas son passé composé ?
Par sa puissance fictionnelle évidente, Omar m’a tuer espère réhabiliter Omar Raddad, cet homme que tout innocente aujourd’hui. Le film est réalisé par Roschdy Zem qui entend bien par là dénoncer le racisme ordinaire et le réflexe discriminatoire des Français envers leur communauté arabe. Excellente idée ! D’autant plus que pour trois kebabs achetés je me suis vu offrir ma place pour Omar m’a tuer.
Zem passe 1h30 à balancer des faits allant dans le sens de l’innocence de Raddad tout en glissant ci et là les quelques réserves que l’on peut tout de même émettre. Généralement, ce genre de film éveille les consciences bien-pensantes de la frange 45-65 ans des spectateurs qui débattent toujours après la séance sur un ton de JT de France 2. Tendez l’oreille, dans ces conservations reviennent constamment ces quelques mots clés « injustice » « tolérance » « mais tout à fait » « les mentalités » « immigration » « oui enfin Tunisie, Maroc c’est pareil, on s'est compris. » Le problème de ces films qui se basent (se calquent) sur un fait divers, c’est qu’on en oublie de parler cinéma. Allah merci, il y a toujours une dame plus finaude que ses copines pour conclure le débat humaniste : « Pour un arabe, dis donc, Roschdy Zem a fait du bon travail. » « Votre salle de bains est enfin carrelée, Carole ? Ah, vous parlez encore du film, pardon. »
Omar m’a tuer témoigne d’une société où le Français maugréait sa discrimination et vivait mal son racisme. Régnait à l’époque une hypocrisie sous-jacente qu’illustre bien l’affaire Raddad : l’incrimination de l’« arabe » fût au prix de preuves plus que discutables, voire truquées. Vingt ans après, pour le bien de la collectivité, les mentalités ont considérablement évolué. « Mec, je me suis fait chourrer mon Iphone à la Fête de la musique » « Putain d’arabes » « Non c’est Benoît qui me l’a tiré » « Putain Benoît, depuis qu’il traîne avec des arabes… »
S’il interroge (un peu malgré lui) la société d’alors sur sa citoyenneté, Omar m’a tuer se contente surtout de mettre en images la fiche wikipédia de l’affaire. On ne sort jamais du cadre « fait divers » et on s’attèle très peu sur l’homme (pourtant bien interprété par Sami Bouajila) sinon en qualité de personnage principal de l’affaire. Dépourvu de mise en scène (donc d’identité), il se détache du film, sous son impersonnalité la plus totale, une honnêteté qui le sauve à peine du tout-venant de l’industrie hexagonale dont le plus beau fer de lance reste ce mois-ci L’élève Ducobu, prequel des 400 Coups de Truffaut.
Pour conclure, m’étonnerait pas que dans vingt ans (en 2031 quoi), vous lisiez dans le numéro de juin d’ASBAF International (votre webzine multimédia holoprogrammable en 12G+, traduit en 37 langues et digitalisé jusque sur la Lune, au rythme où vont les choses) la critique du film adapté du dernier fait divers à la mode : le tabassage à mort de la collégienne de 13 ans dans l’Hérault. Farouk ma deffonss. Un film poignant.

Les 14 commentaires idiots

  1. finalement, le probleme des arabes, c'est donc qu'ils sont pas francais?

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  2. Au final, on aura fait plus de bruit autour du "tuer" que de tout le reste.

    "Et c'est ici que s'est déroulé le drame, l'assassinat de MAIS REGARDEZ MOI CETTE FAUTE DE CONJUGAISON PEINTE EN LETTRES DE SANG! C'EST HORRIBLE, IN-HU-MAIN! QU'ON LE BRÛLE EN PLACE PUBLIQUE AU MILIEU D'UN BÛCHER DE BESCHERELLES!"

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  3. Tous des baltringues les français, c'est bien connu :-)

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  4. "Votre salle de bains est enfin carrelée, Carole ? Ah, vous parlez encore du film, pardon" m'a tuer !

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  5. "farouk ma deffonss" Cette fin d'article est tout simplement épique. Plus c'est dégueulasse, plus je ris.

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  6. Mé arraité de dirre que lé reubeuh sav pa parlé franssé. Et puis bon, Facebook et les sms ont aussi tué Jacques Capelovici.

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  7. Humour efficace, j'aime beaucoup le passage avec Benoît !

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  8. Plus c'est de mauvais gout et plus je ris, il faut que je pense à me faire interner je pense...

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  9. +1 pour "Farouk ma deffonss"

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  10. @punk80s : finalement, ton problème, c'est que ton cerveau tu l'as eu dans une pochette surprise ? :O

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  11. tj aussi drole, mais pas d'accord... j'ai peut-etre eu tort mais je me suis laissé prendre par l'émotion... j'ai été faible sans doute ! quoi qu'il en soit les acteurs sont géniaux : bouajila of course, mais aussi mon ami podalydes...

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  12. Ce que tu as écrit est un torchon, comment rire d'une communauté sans être poli avec ? Et non, il n'y aura pas de film sur cette collègienne. Respecte l'Homme qu'il soit armé de Kipa ou de main de Fatma.

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  13. un film grâve sur le fléau de notre siècle: la dysléxie.
    un reportage, poignant

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  14. J'ai effectivement trouvé dommage de rester dans le factuel. Omar ne m'a pas émue. Et j'ai pas envie de me demander s'il est coupable.
    Dommage !

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Fous au moins un pseudo, les anonymes ça nous pète les yeukous.